Interview de Quatrelle sans elles
par Le morse des mers
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Interview réalisée le 05/10/2010
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Dernières annotations le 07/10/2010
Quatrelle sans elles est issu de la troisième génération de pixel artists obscurs, génération n’ayant pas connu le lancement de Panda Pixela et de Zircanews1. Néanmoins, il a su rapidement s’imposer dans le domaine grâce notamment à ses capacités à se fondre dans divers styles distincts découlant sur un éventail d’oeuvres exotiques...
Comment as-tu découvert le Pixel Art Obscur ?
Grâce a une rencontre avec Le morse des mers qui m’a présenté le mouvement.
Pourquoi avoir choisit de promouvoir ton art en publiant tes oeuvres sur ZC Virtual Underground Art Gallery ?
Pour la notoriété et la reconnaissance entre artistes.
Tu es le premier artiste de la nouvelle vague Pixel Art Obscur (c’est à dire post Panda Pixela) à utiliser des bases du Panda comme le témoigne ta toute première oeuvre Je suis vert, mon para…, suivie plus tard de La petite fille moche et son ballon. Voulais-tu rendre hommage au fondateur du mouvement ou manquais-tu d’assurance pour te lancer directement dans des oeuvres 100% originales ?
C’est effectivement un clin d’oeil au père fondateur du mouvement mais aussi aux responsables du site.
La base Giacometti semble te fasciner, y a-t-il une raison particulière à cela ?
Tout simplement parce que je trouve le personnage beau et gracieux.
Au delà de l’utilisation de cette base, Je suis vert, mon para… fait preuve d’une grande maturité pour une première oeuvre de part le soin apporté aux divers éléments. Considères-tu cette première incursion comme expérimentale ou avais-tu une idée précise du résultat avant la conception ?
En fait, Je suis vert, mon para… n’était pas un coup d’essai. Pour tout vous dire j’avais déjà deux ou trois oeuvres à mon actif. En effet, j’ai commencé à faire du Pixel Obscur sans le savoir, sur Atari 520.
Perspective de chiotte2 est une représentation quasi fidèle de tes propres toilettes. Quelles étaient tes motivations pour la réalisation de cette oeuvre ?
C’est la perspective qui m’inspirait avant tout, l’idée du chiotte est venu plus tard.
Après, le surréalisme et la nature morte, tu t’essaies à un tout nouveau style avec Trouve ta voie…, qu’on pourrait qualifier d’oeuvre ludique. Voulais-tu faire passer un message particulier avec cette oeuvre ou s’agit-il d’un simple détournement des jeux de labyrinthes que l’on trouve dans les revues pour enfant ?
Je voulais provoquer la reflexion aurpès de mon public en lui montrant qu’il y a plusieurs chemins pour arriver à un même point.
Il pleut sur l’éléphant bleu rappelle l’imagerie des livres pour jeunes enfants. Recherchais-tu précisément ce rendu graphique ?
Tout a fait , cela découle même directement de ma méthode de travail : je cherche une idée en laissant mon esprit vagabonder puis dès que j’entrevois une scène ou un concept, je finalise immédiatement mon oeuvre, expurgée de tout détail superflu.
L’escargot la tête en haut reste dans la lignée de l’oeuvre précédente dans le style graphisme enfantin avec une pointe de surréalisme. Exprimes-tu des idées particulières à travers ces oeuvres ou est-ce uniquement le fruit d’une inspiration purement esthétique ?p
L’escargot la tête en haut ainsi que Il pleut sur l’éléphant bleu et Ma trace de ski sont des oeuvres que je qualifierais d’inspiration crayon jeté. C’est à dire qu’elles représentent l’imagerie brute renvoyée par mon cerveau au moment où l’idée y a germée.
Cette esthétisme est conservé sur Le papillon masqué3 mais cette oeuvre tranche totalement avec les deux précédentes via la violence de la scène représentée. Cherchais-tu à surprendre ceux qui s’attendaient une nouvelle oeuvre innocente à l’instar des deux précédentes ?
Le papillon masqué est une oeuvre que l’on peut qualifier de sanglante en effet, tout comme Mr Lapin n’a plus faim. Je voulais, par ce biais, me démarquer et montrer l’étendu de mon style.
Tu remets une nouvelle fois en scène la base Giacometti pour les besoins de La petite fille moche et son ballon, une oeuvre magistrale qui mixe les styles expérimentés précédemment. Marques-tu ici le début d’un nouveau cycle dans ton oeuvre (symbolisée par la présence de Giacometti, base à l’origine de ton initiation dans le domaine) ?
Je voulais mettre en scène Giacometti dans un tableau réel. Cette scène peut etre tout a fait credible et pourtant elle est completement imaginaire.
La femme canon affirme ta maîtrise graphique et ton côté ludique avec le double sens du terme « canon ». Considères-tu cette création comme une oeuvre rébus, c’est à dire une représentation graphique d’un terme faisant office de titre ?
Tout a fait , je voulais faire une oeuvre a double sens. J’a passé beaucoup de temps sur ce personnage qui n’ a vraiment pas été évident a réalisé.
Tu t’es ensuite essayé à une série d’oeuvres sur le thème de la du monde de football en détournant les codes de ce sport : gradins à moitié remplis (Coupe du monde de foot : France – Andorre), piscine et patinoire reconverties en stade (respectivement Coupe du monde de foot sans touche et Coup du monde de foot sur glace). D’où te sont venues ces idées ?
Je voulais réaliser des oeuvres faisant référence à l’actualité4, bien que nous étions à trois mois des festivités, la coupe du monde commençait déjà à envahir les médias.
Tu enchaines ensuite par Ma trace de ski, souhaitais-tu revenir aux fondamentaux du Pixel Art Obscur avec cette oeuvre graphiquement épurée mais non moins percutante ?
Ma trace de ski est une oeuvre qui se veut simple mais que j’apprécie particulièrement. Elle me rappelle des tas de souvenirs, des paysages, des moments sur mes skis…
As-tu été inspiré par des oeuvres du Panda tels Perdu sur la banquise ?
Probablement. Il se peut que cette oeuvre ait marqué mon subconscient et m’ait de ce fait inspiré inconsciemment Ma trace de ski, mais ce n’est en aucun cas une copie ou une adaptation, la référence n’est pas intentionnelle.
Après cette oeuvre, tu publies La fille dans la galerie d’art qui contrairement à Ma trace de ski est d’une maîtrise graphique, esthétique et poétique totale. Peux-tu nous expliquer le choix des couleurs sur cette oeuvre ?
J’ai choisi le gris pour donner un style contemporain, gris terne, répétitif et fade avec une touche de jaune pour symboliser l’espoir et la vie tout simplement.
Cette représentation paraît extrêment réaliste, as-tu été inspiré par une scène dont tu as été témoin ?
Non pas particulièrement ou alors il s’agit encore une fois de quelque chose enfoui dans mon subconscient. En tout cas je n’ai pas le souvenir d’une telle scène dans la vie réelle.
A boire patron ou je tue la souris blanche reprend le concept de l’imagerie enfantine associé à la violence du Le papillon masqué. Comment as-tu imaginé cette oeuvre surprenante ?
Traditionnellement, la base même d’un dessin s’esquisse d’un crayonné noir sur un fond blanc. J’ai voulu inverser cette tendance en permutant les deux couleurs et donc dessiner en blanc sur un fond noir. En m’essayant à cet exercice, je suis tombé par hasard sur ce personnage, j’ai donc continué mon dessin sans vraiment réfléchir à la finalité et cela a abouti à cette oeuvre.
Ma Xsara Picasso façon Picasso5 est totalement en décalage graphique avec ce que tu publies habituellement. Quelles étaient tes intentions au moment de la conception de cette oeuvre ?
J’ai voulu réaliser une oeuvre en m’inspirant d’un style artistique proche de MonsieurPaulLeBoulanger avec son oeuvre Si Rothko avait bossé sous paint 2.
Tout comme Trouve ta voie…, « Intercontrat de » en 40 points est une autre oeuvre ludique inspirée par les jeux pour enfant. Voulais-tu instaurer une sorte d’interactivité dans le Pixel Art Obscur avec ce type d’oeuvre ?
Je me trouvais dans une situation pas facile à gérer personnellement et je voulais faire passer le message de manière artistique.
Voulais-tu dénoncer la politique de certaines SSII à travers cette oeuvre et le message en émanant ?
Certainement…
Alfred le canard en mode approche se rapproche graphiquement de La fille dans la galerie d’art. Cette dernière représentait une scène immobile alors que là le personnage central est en mouvement. Voulais-tu opposer ces deux oeuvres en terme d’action ?
J’ai proposé cette oeuvre comme une suite de la précédente. Elle représente un atterrissage, un changement d’action, de mouvement. Elle nous montre que le temps n’est pas figé que l’on peut atterrir ou changer d’élément. C’est une oeuvre contre la fatalité.
C’est la première fois que tu baptises l’un de tes personnages, y a-t-il une raison particulière ? Le choix du prénom Alfred était-il arbitraire ?
Alfred est un prénom que j’aime bien et que je trouve sympa pour un animal.
Tu mélanges encore une fois tes différents styles dans Mr Lapin n’a plus faim. Au final cette oeuvre mèlent de nombreux thèmes qui te sont chers tout en évitant une surenchère graphique. Comment as-tu réussi cet exploit ?
Je n’ai pas tellement cherché un quelconque exploit. L’idée s’est présentée, j’ai pris ma souris et je me suis laissé guider par l’image que j’avais en tête.
Le pingouin et son ombre provoque un sentiment de solitude à l’instar de La fille dans la galerie d’art. Exprimes-tu une angoisse particulière à travers ces oeuvres ?
J’ai peut-être effectivement voulu exprimer un sentiment de solitude que j’ai parfois ressenti durant mon enfance, je ne sais pas, je ne fais pas d’analyse profonde de mon oeuvre, je laisse les psychologues en herbe creuser si ça leur chante…
Cette oeuvre, très poétique, est à l’opposé de tes premières représentations animalières. Est-ce le résultat d’une progression dans ton style ou voulais-tu dégager d’autres thèmes et d’autres sensations à travers cette création ?
Oui tout à fait, je pense que mon style évolue au fil de mes créations car je prends soin de ne garder que les bonnes choses et d’y ajouter de nouveaux éléments à titre d’expérimentation.
Dans Vive les vacances à la mer, tu renoues avec le style instauré dans la série « Coupe du monde de foot ». Cette oeuvre est-elle autobiographique ?
Un peu comme le stade de foot, c’est un thème d’actualité mis en forme. J’ai voulu montrer le côté désenchanté des vacances en bord de mer, à savoir la foule et le stress de la marré humaine. Je suis peut-être un vrai solitaire en fait…
Ta dernière oeuvre en date Mister l’Ane regardant passer une étoile filante un soir d’été rend-elle hommage à Ane ânonnant aux âmes damnées dans un décor champêtre de Discobilly ?
Non pas particulierement. En fait j’étais parti pour faire un chien, mais ma souris en a décidé autrement.
Outre le Pixel Art Obscur, tu as également participé au Moellon Project avec trois oeuvres très appréciées des amateurs de moelloning : Un banc deux places, Moellons en week-end et Moellons en vitrine. D’où t’es venu l’engouement pour ce mouvement contemporain ?
Lorsque j’ai découvert ce mouvement, j’ai trouvé cela énorme et complètement artistique n’en déplaise aux détracteurs. J’ai voulu apporter ma pière à l’édifice du Moellon Project.
Que pense-tu des oeuvres des autres artistes publiant sur ZC Virtual Underground Art Gallery ?
J’aime beaucoup les oeuvres du site et je suis assidument chaque publication. C’est un réel bonheur d’admirer ces créations faisant état d’un talent imaginatif hors du commun.
As-tu d’autres activités, artistiques ou non ?
Un peu sculpture à mes temps perdus…
Propos recueillis par Le morse des mers
Annotations :
- Ancien nom de ZC Virtual Underground Art Gallery.
- Il s’agit de la première oeuvre Pixel Art Obscur à avoir fait l’objet de produits dérivés (dans un cadre privé) : une impression mise sous cadre et deux impressions dédicacées.
- Certains sont en droit de se demander pourquoi cette oeuvre ne figure pas dans la galerie zoologique. Tout simplement parce que Quatrelle sans elles considère que le personnage du Le papillon masqué n’est pas un animal mais un homme sous un déguisement.
- Ces oeuvres ont été publiées le 30 mars 2010, aux prémices du tapage médiatique lié à l’édition 2010 de la Coupe du Monde de Football de la FIFA.
- Deuxième oeuvre à être déclinée dans un format dérivé, toujours dans un cadre privé. Elle a fait l’objet d’un agrandissement 40*50cm mis sous verre dans un cadre en bois.